Les habitués du sport automobile belge croisent régulièrement sa longue silhouette dans les paddocks des circuits, sur les aires d’assistance de rallye. Chez nous, le nom de Jack Buytaert est étroitement lié à celui de Pirelli.
Jack, on vous voit souvent du côté du camion Pirelli en course. Mais vous avez d’abord été pilote moto.
« En effet. Pendant de nombreuses années, j’ai défendu les couleurs Honda sur deux roues. J’ai notamment remporté deux fois les 24 Heures de Liège dont une édition sur l’ancien circuit ! J’ai également terminé sur le podium du championnat d’Europe d’endurance. Une carrière qui a duré douze ans. Si je suis rangé des motos, le démon des sports mécaniques me ronge toujours. Ainsi, j’ai terminé 5ème des 24 Heures de Francorchamps, il y a quelques années, sur une Opel Astra préparée par M.I. Je participé à de nombreuses manches du Belcar et cette saison, je dispute encore la Zolder Touring Cup. Quand le temps me le permet, j’aime aussi m’amuser en karting. Vous voyez, à 54 ans, je suis toujours aussi passionné. Une passion qui m’aide évidemment dans mon métier. Cela fait 24 ans que je travaille pour Pirelli. Le service compétition est basé à Herentals où nous stockons les enveloppes commandées en Italie avant de les acheminer vers les épreuves. »
Pirelli s’implique dans le rallye belge depuis longtemps. Mais cette année, la firme italienne est étroitement liée à la RACB Rally Cup. Pourquoi ?
«Ce n’est pas la première fois que nous sommes impliqués à ce niveau. Il y a quelques années, Pirelli équipait officiellement les AX du challenge. Cette fois, ce sont les circonstances qui nous ont poussés vers cette sympathique formule de promotion dont le succès est impressionnant. Ce week-end, quatorze C2 ont rentré leur bulletin d’engagement au rallye de Wallonie. Heureusement, du côté de Pirelli, nous avons anticipé cette réussite et commandé des pneus en quantité suffisante en Italie. En moyenne, on compte huit pneus par voiture pour une épreuve de deux jours. Au sein de la RACB Rally Cup, les concurrents ont le choix entre deux types de pneus pour les routes sèches et un type de gommes intermédiaires quand il pleut. Nos monteurs, au nombre de trois ou quatre, sont installés dans le camion Pirelli et peuvent retailler les pneus à la demande des pilotes quand les vannes célestes sont généreuses. »
Le manufacturier italien est également présent en circuit ?
« En effet. Que ce soit en BTCS ou en Belcar, nos enveloppes chaussent de nombreuses voitures. Sur une année, environ 7000 pneus, en provenance de notre usine de Turin, sont utilisés dans les différents types de compétitions automobiles en Belgique. Pour nous, la difficulté réside dans le fait de savoir qui emploiera nos produits des mois avant le début de la saison. Les responsables de Pirelli nous demandent de passer commande en octobre. Cette période étant plus calme pour eux, ils peuvent se mettre à fabriquer nos pneus immédiatement. Contrairement au bon vin, les enveloppes vieillissent mal. Au-delà de trois ans, la qualité des gommes est très affectée, même si les pneus sont entreposés dans un endroit sec où la température n’est pas excessive. »
Les pilotes vous demandent-ils souvent votre avis pour choisir un type de pneu précis ?
« La plupart me demande conseil, sachant que je connais bien le produit. J’avoue que j’essaie toujours d’éluder la question quand un pilote me demande quel type de pneu je choisirais dans telle ou telle circonstance. Le pneu n’est pas la seule clé de la réussite, évidemment. Il y a aussi – et surtout – la façon dont le pilote enfonce l’accélérateur. Je me souviens d’une édition des 24 Heures de Francorchamps où Gerhard Berger, alors au début de sa brillante carrière, avait signé un chrono d’enfer au volant d’une BMW. Certains pilotes avaient remarqué que l’Autrichien disposait de gommes Pirelli particulières et m’ont demandé de chausser les mêmes. Eh bien, ils étaient 3 secondes moins vite au tour qu’avec leurs pneus habituels ! Pourquoi ? Parce que les Pirelli employés par Berger étaient si tendres et collaient tellement à la piste qu’ils pénalisaient la voiture en ligne droite. Il fallait l’immense talent de Gerhard pour en tirer la quintessence en passant beaucoup plus vite en courbe. »
Les pneus de route bénéficient-ils de la technologie utilisée pour les pneus de course ?
« Bien sûr ! En général, un pilote ne soupçonne pas les progrès qui ont été réalisés en matière pneumatique au cours des dernières décennies. L’automobiliste, encore moins. On ne peut pas dire que le revêtement des routes belges soit un modèle de perfection. Pourtant, à quand remonte votre dernière crevaison avec une voiture de série ? C’est grâce aux progrès réalisés en compétition que les enveloppes ont si bien progressé pour vous éviter le changement de roue, sous la pluie, dans une nuit d’encre. Je remarque aussi que les dessins des pneus ‘haute performance’ sont souvent copiés des pneus racing, avec un ou deux ans de retard. Bref, la compétition est un redoutable banc d’essai et le rallye, proche du public, une formidable vitrine de notre savoir-faire. »
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